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Cours ta ville // Courir le Vieux-Québec

Cours ta ville // Courir le Vieux-Québec

- Photos de Julien Marleau

Chaque fois que tu y remets les pieds, tu n’en reviens pas que ce soit chez toi, ici.
 
Tu as beau savoir que ce décor recèle de considérables morceaux qui se contentent d’imiter l’histoire plutôt que d’en témoigner, l’émotion demeure, elle, intacte. La beauté prime sur la vérité.
 
C’est la désertion de la vieille ville provoquée par l’absence de touristes qui t’y a d’abord ramené : tu pouvais courir au milieu de Saint-Jean, Saint-Louis ou Grande Allée, presque sans voir personne. Plus de foule à fendre. Plus de pas chassés à travers la horde.
 
Le retour progressif des visiteurs ne t’a pas découragé. Tu as continué d’y courir en empruntant d’autres voies moins fréquentées. Ainsi, tu files encore au milieu des rues sans gêner personne.
 
Pour une raison que tu t’expliques mal, en marge des artères les plus achalandées, l’intérieur des murs et plusieurs secteurs des vieilles pierres au niveau du fleuve demeurent presque déserts.

C’est le bonheur de courir dans le Vieux-Québec : il n’existe pas de sens uniques pour le piéton et les possibilités de parcours dans ses méandres sont presque infinies. Tu aimes la ligne tortueuse des rues, leur étroitesse qui laisse croire que les édifices s’élèvent haut dans le ciel alors qu’ils ne font que trois étages, parfois quatre tout au plus. La pierre. Les toits de fer-blanc. Le passé condensé.
 
Il t’arrive de retourner sur tes pas pour refaire le chemin par des itinéraires parallèles. Tu gambades sur Couillard, remontes vers la basilique en grimpant Sainte-Famille, puis tu reviens en dégringolant la côte de la Fabrique et reprends à nouveau vers l’est, mais par Garneau, cette fois. Ensuite? Ça dépend. Tu explores et c’est là que tu t’amuses à découvrir des recoins de ta propre ville que tu n’imaginais pas.
 
Au gré de tes pas, loin de la foule, le lieu retrouve son aura de mystère, son potentiel merveilleux. Tu n’avais jamais grimpé au parc du Cavalier-du-Moulin, au bout de Mont-Carmel, et ignorais la superbe vue que promet ce morceau des Plaines que longe l’avenue Saint-Denis, à l’est du Manège militaire. Tu cours sur les murs de la Citadelle et sur les remparts. Tu gravis l’escalier des Gouverneurs ou dévales le Casse-Cou pour poser le pied sur l’inégale surface des pavés qui t’attend en bas.

Des rues étroites, fermées au trafic automobile. Ton pas instable. Te voilà qui retournes vers l’ouest en prenant la rue Sous-le-Cap, captant le regard surpris de dîneurs que tu vois inhaler un ragoût de pattes par les fenêtres arrière du Buffet de l’Antiquaire.
 
Tu remontes sur les pavés. Enjambes quelques marches, files sur le haut des remparts qui surplombent la basse-ville et le Vieux-Port. Le bassin Louise étincelle. La White Birch exhale les longues bouffées de fumée que recrache sa masse de briques. Les clochers des églises désaffectées de Limoilou rythment l’horizon.
 
Restaurants. Boutiques de souvenirs. Chocolaterie. Sauna. Théâtres. Bars en demi-sous-sol. Punks. Itinérants. Touristes. Résidents. Étudiants. Dépanneurs. Police. Livreurs qui encombrent les rues au petit matin. Jardins cachés derrière d’infranchissables murs. Ruelles minuscules qui mènent à d’anciennes écuries converties en garages.
 
Tu cours le Vieux-Québec sans te lasser de la beauté qu’il distille au fil de tes découvertes. Tu ralentis le pas. Tu lèves les yeux. La basilique étend son ombre bienveillante. Tu devines que, dans l’hôtel de ville juste en face, le nouveau maire est probablement en train d’enfiler ses chaussures de course pour mieux t’imiter.