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En vertu d’une fatigue soudaine

En vertu d’une fatigue soudaine

Au lieu du classique Salut, ça va? j’aborde souvent mon entourage composé de coureurs, cyclistes et autres sportifs, avec la formule suivante :
 
En forme?
 
S’ensuit généralement une réponse qui va de pas tellement à oui, très. Mais quelle que soit la réponse, le sous-entendu est toujours le même : si la forme est mauvaise, ce n’est que passager, il s’agit d’y remettre le temps nécessaire pour un retour à la normale.
 
La normale ici est d’être actif, de courir, rouler, nager, de bouger. Dans ce groupe d’individus et plus largement dans la population, le sport c’est la santé, vecteur de bonheur, encouragé par bon nombre de Grand Défi Pierre Lavoie et autres campagnes publiques sur les saines habitudes de vie. Et que ce soit clair, l’idée n’est pas ici de remettre en cause les bienfaits du sport. J’ai vu plus d’une transformation provoquée par ce dernier pour qu’il ne subsiste aucun doute dans mon esprit à ce sujet.
 
Retour en arrière sur une discussion avec un collègue, solide coureur, marathon sous les 2h30, gros volume hebdomadaire, la totale. Il court depuis tout jeune et s’est définit comme personne à travers sa pratique. Il en a même fait son métier, il produit des vêtements de course. Il m’informe ce jour-là ne pas avoir couru depuis plus de deux mois en raison d’une blessure qu’il n’arrive pas à guérir, que dans la foulée, il s’est éloigné de son groupe d’amis, a perdu ses repères et s’est retrouvé isolé.
 
Bam.
 
Malaise en direct sur Zoom, j’aimerais l’encourager mais rien qui ne sonne pas totalement inutile ne me vient. Il m’explique s’être tourné vers sa famille, il vit avec sa femme et leur jeune fille, que le manque causé par sa pause est important, qu’il ne se passe pas une journée sans qu’il y pense.
Exit les amis, les événements, le rush d’endorphines. Exit l’anticipation de retrouver sa gang le dimanche matin pour une sortie pace amical et un cortado lait d’avoine. Exit les discussions parfois futiles mais toujours enflammées autour de la plaque de carbone du nouveau racer qui promet le meilleur retour d’énergie.
 
On peut bien philosopher en se disant qu’il y a pire, et il y a pire, c’est vrai. Tout est toujours relatif mais quand on se tape sur le pouce avec un marteau, on se fout un peu du cancer du voisin. Façon de dire que pour lui, cet arrêt est brutal.
 
L’appel se termine mais l’idée d’être privé de sport reste avec moi pendant plusieurs jours, voire quelques semaines. Dans son cas, la course à pied, ou plutôt l’absence de, est devenu le piège.
 
En prenant un pas de recul, on en vient à questionner la sagesse d’ainsi laisser reposer son plaisir dans la vie sur une seule chose, extérieure, sur laquelle il est impossible d’avoir beaucoup de contrôle.
 
Le course pour le coureur, l’animal domestique du casanier, le fix pour le camé. Tous de parfaits écrans de fumée pour que le bruit ambiant n’arrête jamais.  Le sport pour éviter de passer du temps seul, dans le silence avec des questions qu’on n’ose pas toujours se poser, comme un remède au spleen de l’époque.  
 
J’aimerais vous dire qu’il y a une épiphanie à la fin de cette réflexion mais j’ai bien peur que non. Tout au plus une prise de conscience qui amène à considérer les excès, dans le sport comme le reste, avec un peu plus de scrupule.
 
Le sport socialement accepté, encouragé. C’est peut-être ça le piège au fond.
 
Peut-être pas non plus, je vous laisse voir.